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A-t-on forcément besoin d’une éducation nouvelle ?

Bac de français 2022

Baccalauréat technologique

Corrigé de l’essai

Dans un monde qui change, a-t-on forcément besoin d’une éducation nouvelle ?

Vous développerez de manière organisée votre réponse à cette question, en prenant appui sur Gargantua de Rabelais, sur le texte de l’exercice de la contraction et sur ceux que vous avez étudiés dans le cadre de l’objet d’étude « la littérature d’idées du XVIe au XVIIIe siècle ». Vous pourrez aussi faire appel à vos lectures et à votre culture personnelle.

Proposition de corrigé (rédigée par Jean-Luc)

Introduction

Le volume des connaissances mises à disposition de l’homme s’accroît de manière exponentielle. IBM estime qu’il double actuellement toutes les douze heures. L’informatique, la téléphonie mobile et internet ont créé des usages nouveaux dont sont exclues de nombreuses personnes au point de parler de « fracture numérique ».
Dans ce monde qui change à toute allure, a-t-on forcément besoin d’une éducation nouvelle ?

Développement

L’éducation ne se confond pas avec l’enseignement.

Il convient d’abord de définir ce qu’est l’éducation. C’est un long processus qui doit permettre à un jeune individu d’épanouir ses potentialités intellectuelles, affectives et sociales afin qu’il s’intègre harmonieusement dans le groupe auquel il appartient. L’éducation doit le rendre autonome et responsable. Elle est assurée d’abord par les parents et la famille, puis par les organismes dont ils solliciteront l’aide : école, clubs, associations culturelles et religieuses… L’école, dans notre société, y joue un rôle prédominant par la diffusion de connaissances essentielles et l’intégration sociale. Elle reste cependant, dans sa fonction première d’enseignement, un auxiliaire dans la transmission plus large d’un patrimoine humain.

Dans un monde qui change à toute allure, on a forcément besoin d’une éducation nouvelle.

Déjà, du temps de Rabelais, les progrès de la Renaissance avaient discrédité la scolastique médiévale et les sophismes, si bien que le nouveau précepteur de Gargantua, Ponocratès, a administré à son élève un médicament qui devait lui faire oublier tout ce qu’il avait appris auparavant.
De nos jours, il faut donner aux jeunes un socle de connaissances indispensables pour qu’ils accèdent aux nouvelles technologies de l’information. Trouver une information sans cesse mise à jour nécessite de pouvoir consulter des bases de données informatiques. Notre vie quotidienne a de plus en plus besoin d’accéder à des services dématérialisés. Les réseaux sociaux ont fait exploser les limites étroites de notre cercle de connaissances.
Dans le même temps, pour éviter d’être submergé par le flot des messages, il faut apprendre à rechercher l’information, à la trier, à l’analyser.
L’internationalisation a rendu notre monde infiniment complexe. Elle est finie l’époque où le regard des individus se limitait au village, au pays. Notre vie quotidienne est bousculée par des événements lointains aux causes parfois incompréhensibles pour notre culture. Le recours à la géopolitique devient alors indispensable.
Enfin les arrivées des technologies de manipulation du vivant nécessitent une information objective pour en comprendre les espoirs, mais aussi les limites. Tout s’interpénètre : écologie, agriculture, élevage, médecine, psychologie…

Mais il ne faut pourtant pas oublier une sagesse séculaire qu’il convient cependant d’adapter.

Cet accroissement vertigineux des connaissances ne doit pourtant pas nous conduire à rejeter comme obsolètes les principes d’éducation qui ont formé les générations passées. Ils ont fait leurs preuves en permettant justement ce développement des sciences et la possibilité de vivre ensemble paisiblement dans notre société. Il faut peut-être seulement continuer à les améliorer.
Ainsi, Rabelais fait-il reprendre de fond en comble l’éducation bâclée de Gargantua. Les premiers précepteurs ont accumulé de manière stérile des savoirs douteux. Désormais Ponocratès s’appuie sur un enseignement complet, encyclopédique et moral. Il ne néglige pas l’exercice physique et l’hygiène corporelle, les arts martiaux, les jeux, la musique et la pratique artistique. Il n’oublie pas de développer chez son élève le goût de l’effort, le sens de l’équité et surtout l’esprit critique. Aujourd’hui ce programme paraît utopique dans son aspect globalisant, mais reste applicable dans ses principes. C’est pourquoi Jacqueline de Romilly, recommande, dans notre situation, de nous intéresser d’abord à des cas simples, en examinant notamment le fonctionnement des cités grecques pour comprendre la complexité des relations internationales actuelles. De même elle recommande la littérature antique pour éclairer la grandeur des choix éthiques familiaux ou civiques par le biais des dilemmes comme chez Antigone ou Socrate. Ce principe de distanciation à l’égard de l’actualité au moyen de la sociologie, de l’histoire, de tout ce qui diffère dans les comportements humains, peut nous éviter d’être submergé par les flux d’informations parcellaires. Ce recul, qui prend la forme du principe de précaution, est également profitable à l’égard des progrès scientifiques et techniques qui bouleversent notre société et sa morale, notamment dans le domaine bioéthique. Il peut nous aider à contenir les dérives possibles de la toute-puissance transhumaniste en neuroélectronique et dans le génie génétique.

Selon Jacqueline de Romilly, ces changements accélérés dans le domaine de la morale doivent intéresser l’enseignement. En effet, ils créent le doute chez les jeunes qui remettent en cause les repères moraux traditionnels, et risquent de sombrer dans l’indifférentisme. C’est pourquoi il revient aux éducateurs et à l’école d’aider la jeunesse à se construire son système de valeurs à la lecture des philosophes et des grands écrivains.
L’éducation actuelle doit aussi intégrer les risques que font courir les nouvelles technologies de l’information et de la communication : addiction, stress, dépersonnalisation, perte de contact avec la réalité, harcèlement virtuel…

Conclusion

L’éducation ne se confond pas avec l’enseignement. Elle sollicite de nombreux intervenants pour favoriser l’épanouissement intellectuel, affectif et social d’un jeune individu afin qu’il s’insère harmonieusement dans la société. Elle doit donc forcément tenir compte de l’accroissement exponentiel des connaissances, de l’arrivée des nouvelles technologies de l’information qui nécessitent des apprentissages spécifiques, de la disparition progressive des frontières, et surtout de l’émergence des sciences et des technologies du vivant. Cependant ce déferlement de savoirs et de leurs conséquences éthiques ne doit pas nous conduire à rejeter les leçons du passé. Au contraire nous pouvons apprendre d’elles une certaine permanence de la nature humaine, à découvrir comment les modèles de l’Antiquité peuvent nous aider à comprendre la complexité du monde actuel. L’important est de prendre du recul pour trouver des fils conducteurs dans ces flux d’informations parcellaires. L’enseignement peut et doit jouer un rôle essentiel pour que la jeunesse apprenne à penser et qu’elle évite ainsi l’indifférentisme moral. L’éducation doit aussi s’adapter en se souciant de diffuser un bon usage des nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Voir aussi