Aller au contenu
Le bac de français 🏷️ Annales et corrigés 🏷️ Sujets et corrigés du bac français 2019

Bac français 2019 : sujet des séries S et ES

Sujet du bac de français 2019

Séries S et ES

Objet d’étude : écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours

Corpus :

  • Texte A : Alphonse de Lamartine, « L’Isolement », strophes 1 à 6, Méditations poétiques, 1820
  • Texte B : Anna de Noailles, « La Vie profonde », Le Cœur innombrable, 1901.
  • Texte C : Andrée Chedid, « Destination : arbre », Tant de corps et tant d’âme, 1991.
  • Texte D : Yves Bonnefoy, « La pluie d’été », Les Planches courbes, 2001.

Alphonse de Lamartine, « L’Isolement », strophes 1 à 6, Méditations poétiques, 1820

L’Isolement

Lamartine Souvent sur la montagne, à l’ombre du vieux chêne,
Au coucher du soleil, tristement je m’assieds ;
Je promène au hasard mes regards sur la plaine,
Dont le tableau changeant se déroule à mes pieds.

Ici, gronde le fleuve aux vagues écumantes,
Il serpente, et s’enfonce en un lointain obscur ;
Là, le lac immobile étend ses eaux dormantes
Où l’étoile du soir se lève dans l’azur.

Au sommet de ces monts couronnés de bois sombres,
Le crépuscule encor1 jette un dernier rayon,
Et le char vaporeux de la reine des ombres
Monte, et blanchit déjà les bords de l’horizon.

Cependant, s’élançant de la flèche gothique,
Un son religieux se répand dans les airs,
Le voyageur s’arrête, et la cloche rustique
Aux derniers bruits du jour mêle de saints concerts.

Mais à ces doux tableaux mon âme indifférente
N’éprouve devant eux ni charme, ni transports2,
Je contemple la terre, ainsi qu’une ombre errante :
Le soleil des vivants n’échauffe plus les morts.

De colline en colline en vain portant ma vue,
Du sud à l’aquilon3, de l’aurore au couchant,
Je parcours tous les points de l’immense étendue,
Et je dis : Nulle part le bonheur ne m’attend.
[…]

Notes

1 Encor : encore.
2 Transports : émotions intenses.
3 Aquilon : vent du nord.

Anna de Noailles, « La Vie profonde », Le Cœur innombrable, 1901.

La Vie profonde

Être dans la nature ainsi qu’un arbre humain,
Étendre ses désirs comme un profond feuillage,
Et sentir, par la nuit paisible et par l’orage,
La sève universelle affluer dans ses mains !

Vivre, avoir les rayons du soleil sur la face,
Boire le sel ardent des embruns1 et des pleurs,
Et goûter chaudement la joie et la douleur
Qui font une buée humaine dans l’espace !

Sentir, dans son cœur vif, l’air, le feu et le sang
Tourbillonner ainsi que le vent sur la terre.
− S’élever au réel et pencher au mystère,
Être le jour qui monte et l’ombre qui descend.

Comme du pourpre soir aux couleurs de cerise,
Laisser du cœur vermeil couler la flamme et l’eau,
Et comme l’aube claire appuyée au coteau
Avoir l’âme qui rêve, au bord du monde assise…

Note

1 Embruns : fines gouttelettes, formées par les vagues et emportées par le vent.

Andrée Chedid, « Destination : arbre », Tant de corps et tant d’âme, 1991.

Destination : arbre

Parcourir l’Arbre
Se lier aux jardins
Se mêler aux forêts
Plonger au fond des terres
Pour renaître de l’argile

Peu à peu
S’affranchir des sols et des racines
Gravir lentement le fût
Envahir la charpente
Se greffer aux branchages

Puis     dans un éclat de feuilles1
Embrasser l’espace
Résister aux orages
Déchiffrer les soleils
Affronter jour et nuit

Évoquer ensuite
Au cœur d’une métropole
Un arbre     un seul
Enclos dans l’asphalte
Éloigné des jardins
Orphelin des forêts

Un arbre
Au tronc rêche
Aux branches taries
Aux feuilles longuement éteintes

S’unir à cette soif
Rejoindre cette retraite
Écouter ces appels

Sentir sous l’écorce
Captives mais invincibles
La montée des sèves
La pression des bourgeons
Semblables aux rêves tenaces
Qui fortifient nos vies

Cheminer d’arbre en arbre
Explorant l’éphémère
Aller d’arbre en arbre
Dépistant la durée.

Note

1 Les espaces aux vers 11 et 18 sont un choix d’Andrée Chedid.

Yves Bonnefoy, « La pluie d’été », Les Planches courbes, 2001.

I

Yves Bonnefoy Mais le plus cher mais non
Le moins cruel
De tous nos souvenirs, la pluie d’été
Soudaine, brève.

Nous allions, et c’était
Dans un autre monde,
Nos bouches s’enivraient
De l’odeur de l’herbe.

Terre,
L’étoffe de la pluie se plaquait sur toi.
C’était comme le sein
Qu’eût rêvé un peintre.

II

Et tôt après le ciel
Nous consentait
Cet or que l’alchimie1
Aura tant cherché.

Nous le touchions, brillant,
Sur les branches basses,
Nous en aimions le goût
D’eau, sur nos lèvres.

Et quand nous ramassions
Branches et feuilles chues,
Cette fumée le soir puis, brusque, ce feu,
C’était l’or encore.

Note

1 Alchimie : l’alchimie avait pour objectif de transformer les métaux en or.

Vous répondrez à la question suivante (4 points) :

Quelle(s) relation(s) le poète entretient-il avec la nature dans les poèmes du corpus ?

Lire le corrigé »

Vous traiterez ensuite, au choix, l’un des sujets suivants (16 points) :

Commentaire

Vous commenterez le poème d’Andrée Chedid, « Destination : arbre » (Texte C).

Lire le corrigé »

Dissertation

« Avoir l’âme qui rêve, au bord du monde assise… », écrit Anna de Noailles (texte B, dernier vers).
Pensez-vous que ce vers puisse définir l’attitude du poète face au monde ?
Vous vous appuierez sur les textes du corpus, les œuvres que vous avez étudiées en classe ainsi que sur vos lectures personnelles.

Lire le corrigé »

Écriture d’invention

« Nulle part le bonheur ne m’attend », écrit Lamartine. Dans un texte poétique d’une certaine ampleur, vous prendrez le contrepied de cette affirmation, en évoquant l’épanouissement et la plénitude du poète au sein de la nature. Vous pourrez choisir d’utiliser une forme versifiée ou une prose poétique.

Voir aussi