Les propositions
Une contribution de Michel.
Les considérations ci-dessous, sur les propositions, sont en grande partie tirées de la page « Les propositions subordonnées ».
On appelle proposition l’ensemble des mots formés par le verbe et les termes qui se groupent autour de lui pour préciser comment se fait l’action indiquée par le verbe ou quel est l’état exprimé par le verbe. Dans une phrase, il y a, en général, autant de propositions que de verbes conjugués.
- La proposition indépendante est dépourvue de proposition subordonnée. Exemple : « Ils étaient armuriers de père en fils » (chapitre 1).
- La proposition principale ne dépend de rien et elle est toujours complétée par une proposition subordonnée. Exemple : « Mon grand-père, qui n’était pas “monsieur l’aîné”, n’hérita pas de la cartonnerie » (chapitre 1).
- Les propositions subordonnées sont dans la dépendance d’une proposition principale. On parle de subordonnée rectrice lorsqu’elle régit elle-même une subordonnée. Chaque proposition subordonnée est généralement reliée à la proposition rectrice, par un mot de liaison. Exemple : « Les ministres regardant comme avantageux que le Roi répondît en personne à la demande que lui faisait l’Assemblée de s’occuper de mesures qui fissent cesser les rassemblements extérieurs qui entretenaient l’inquiétude de la France et rendaient la guerre préférable à une paix ruineuse et avilissante, le Prince s’y rendit en personne pour l’assurer qu’il ne négligeait rien pour répondre à ses désirs » (Mme de Tourzel, Mémoires, chapitre 16).
- La proposition subordonnée relative est introduite par un pronom relatif simple (dont, où, que, qui, quoi) ou composé (auquel, duquel, lequel, à qui…). Ce pronom relatif joue un double rôle ; il représente un nom, un pronom ou un antécédent, contenu dans la proposition rectrice; il introduit la subordonnée et la rattache à sa rectrice. Ainsi dans « Il s’imagina que les gens les plus instruits étaient ceux qui enseignaient les autres » (chapitre 1), la proposition subordonnée relative « qui enseignaient les autres » est une expansion du pronom « ceux ». Une proposition subordonnée relative est dite déterminative quand elle complète l’antécédent à la manière d’un adjectif et permet de l’identifier avec précision. Ainsi, dans «Les enfants qui n’écoutaient pas n’ont rien compris », la subordonnée « qui n’écoutaient pas »est déterminative; la phrase oppose ici deux groupes distincts : « les enfants qui n’écoutaient pas », et « les autres enfants qui écoutaient », et seuls les premiers sont concernés par le verbe « comprendre ». Par contre, dans « Les enfants, qui n’écoutaient pas, n’ont rien compris », la subordonnée relative n’est pas déterminative ; elle est explicative ou appositive. De même, la subordonnée est déterminative dans « Connaissez-vous un homme qui n’ait aimé qu’une seule femme ? » ou dans « Il a acheté un jardin qui les nourrit, lui et les siens ». Les subordonnées relatives peuvent aussi être attributives du sujet (comme dans « Elle était là, qui attendait patiemment ») ou de l’objet (comme dans « Il a les mains qui tremblent »). Elles peuvent être « substantives », sans antécédent, comme dans « Qui m’aime me suive » ou dans « Plaignez-vous à qui vous voudrez ». Dans « Il arrivait dans les sous-préfectures de la plaine, après quoi il faisait enfin son entrée au chef-lieu » (chapitre 2), on considérera que « après quoi »est un adverbe de liaison, et que « il faisait enfin son entrée au chef-lieu » n’est pas une proposition subordonnée.
- La proposition subordonnée conjonctive est introduite par une conjonction de subordination (que, ce que, comme, dès que, lorsque, parce que, quand, si…). Elle peut être complétive et ne peut alors être déplacée ni supprimée sans que la proposition rectrice perde son sens ; ainsi, dans « Cet oiseau rouge apprit à Rome que ses légions venaient d’égorger les barbares » (chapitre 1), la proposition « que ses légions venaient d’égorger les barbares » est complétive. Elle peut être circonstancielle et alors peut souvent être supprimée sans que la proposition rectrice perde son autonomie ; ainsi, dans « C’est Garlaban, où les guetteurs de Marius, quand ils virent briller un feu sur Sainte Victoire, allumèrent un bûcher de broussailles » (chapitre 1), la proposition « quand ils virent briller un feu sur Sainte Victoire » est circonstancielle.
- Les propositions complétives pures sont introduites par que (mais « que » ne doit pas représenter un antécédent) et par ce que (« ce que » signifie alors « le fait que » ou « la chose que ») : « Je souhaite que tu viennes », « Je m’attends à ce qu’il pleuve ». Elles peuvent assumer les fonctions de sujet (« Qu’elle soit désespérée m’agace »), de terme complétif (« Il est regrettable qu’elle soit désespérée »), d’apposition (« Elle ne veut qu’une chose : que tu viennes demain »), d’attribut (« L’essentiel est que tu viennes »), de complément du nom (« Je ne condamne pas le fait qu’elle soit désespérée »), de complément de l’adjectif (« Elle est heureuse que le président du jury soit venu la féliciter »), de complément d’objet direct (« Elle m’a dit qu’elle viendrait à la fête ») ou indirect (« Je m’oppose à ce qu’elle vienne à la fête »).
- On range parmi les complétives les propositions interrogatives indirectes, comme « J’ignore si elle viendra à la fête », « Je me demande quelle heure il est » ou « Elle a demandé comment on obtenait une note supérieure à huit ».
- Pour fixer les idées, analysons la phrase « Si j’apprends que vous ayez reçu la nouvelle de sa mort sans larmes, je reviendrai, et je vous pardonnerai peut-être l’amour que vous aurez eu pour lui durant sa vie, pourvu que sa mort vous ait été indifférente » (Mlle de Scudéry, Le Grand Cyrus, partie 4, livre 2). La condition « Si j’apprends que vous ayez reçu la nouvelle de sa mort sans larmes » est constituée de la rectrice « Si j’apprends », subordonnée à « je reviendrai », et de la complétive de cette rectrice « que vous ayez reçu la nouvelle de sa mort sans larmes ». La relative « que vous aurez eu pour lui durant sa vie» et la circonstancielle « pourvu que sa mort vous ait été indifférente » sont toutes deux subordonnées à « je vous pardonnerai peut-être l’amour ».
- Dans « Ma chère tante, ayant entendu dire que les gens de la campagne appelaient Thomas leur pot de chambre, avait décidé de l’appeler Jules » (chapitre 8), une proposition subordonnée (dite participiale) est « ayant entendu dire », le sens étant « parce qu’elle avait entendu dire ». Dans « L’innocente créature, faute d’avoir fait son service militaire, l’ignorait » (chapitre 8), la proposition subordonnée (dite, infinitive) est « faute d’avoir fait son service militaire », le sens étant « parce qu’elle n’avait pas fait son service militaire ». Dans chacun de ces cas, la proposition subordonnée n’est pas précédée d’un mot de liaison. On trouvera d’autres exemples de telles propositions participiale et infinitive dans « J’ai raconté cette anecdote en détail, parce qu’il m’a paru qu’elle dépeignait le temps, et ensuite parce que dans le cours de la procédure du Châtelet, quelques personnes s’étant amusées à déposer m’avoir entendu souhaiter que tous les Aristocrates fussent mis à la lanterne, j’ai trouvé que le fait que je viens de raconter était une bonne réponse à leur calomnie » (4, page 152).
- Enfin, signalons qu’il n’y a pas de subordonnée dans les tournures emphatiques telles que « C’est hier que j’ai rencontré Julie à la piscine ». Celle-ci met en valeur le « hier ».