Je suis allé / J’ai été... ?

dans Langue française
Quelle différence faites-vous entre :
Je suis allé au marché ET
J'ai été au marché.
J'entends en permanence cette deuxième, est-elle erronnée ? Ou y a t-il une nuance ? (JE note que j'ai trouvé chez Diderot, ou encore chez Flaubert cette deuxième forme....) ?
Je suis allé au marché ET
J'ai été au marché.
J'entends en permanence cette deuxième, est-elle erronnée ? Ou y a t-il une nuance ? (JE note que j'ai trouvé chez Diderot, ou encore chez Flaubert cette deuxième forme....) ?
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Réponses
J'ai été = passé composé du verbe "être" (= je me suis trouvé à un moment donné au marché)
Cordialement,
Mais "j'ai été" étant la vox populi, devient la vox dei ;-)
Isabo, oui mais l'imparfait conviendrait mieux dans ta nuance "ce matin, j'étais au marché". Cependant, "j'ai été" est beaucoup plus statique que "je suis allée"
J'ai été au marché = j'y étais, sur place, s'est sans doute amalgammé avec "j'y suis allée" (j'ai fait le déplacement) En fait, une fois que "je suis allée", comme disait Lagardère (ou Nevers je crois) J'y suis !
"Dans une structure où il est employé en corrélation avec le présent, le passé composé marque l’antériorité par rapport à celui-ci" (Grammaire de Riegel et al.)
En effet, dans un récit au présent, dans un dialogue, une lettre.... le passé composé marque l'antériorité par rapport au présent pour des actions limitées (dont on connaît le début et la fin).
Il suffit alors de transposer la phrase dans un texte au passé pour se rendre compte que le verbe "être" n'est pas approprié :
"Je fus au marché et achetai de belles tomates" (ou alors il faudrait modifier la phrase : "Je fus au marché en un clin d'oeil et achetai de belles tomates."
En revanche, "J'allai au marché et achetai de belles tomates..." convient très bien.
Comme le signale entre autres le Robert, employer "être" au lieu d' "aller" est très courant au passé composé et au plus-que-parfait, quand le verbe est suivi d'un infinitif ou d'un complément de lieu :
J'ai été au marché.
J'ai été acheter des carottes.
Il avait été au marché.
Il avait été acheter des carottes.
On ne peut pas vraiment dire que cet emploi soit moins poli. Tout au plus familier, comme le qualifie le TLF en donnant des exemples d'écrivains fort estimables. Je ne pense pas qu'il y ait lieu de chercher à tout prix une nuance en se référant à un sens général du verbe être (qui multiplie d'ailleurs les sens divers dans ses très nombreux autres emplois).
Ce qu'il y a d'amusant, c'est qu'au passé simple, l'emploi d' "être" à la place d' "aller", loin d'être considéré comme impoli, est même qualifié de "littéraire" : "Lorsque j'appris que ma voisine avait une compagne, je fus la voir." (BERNARDIN DE SAINT-PIERRE) "Mais il ne tint que huit jours et il s'en fut, claquant les portes." (H. BAZIN)
Dire ou écrire "je suis allé" suggère l'idée de déplacement : j'y suis allé, j'en suis revenu. Ce qui compte est l'acte de s'être déplacé de là vers ailleurs.
"J'ai été" donne au propos une autre nuance. Ce qui vaut ici, c'est le fait d'avoir été présent en un endroit, à un moment. L'acte est moins ponctuel.
Exemples bêtes : "Je suis allée chez ma grand-mère lui apporter une galette et un petit pot de beurre."
"J'ai été à la guerre." ; "J'ai été plusieurs fois chez cette personne depuis que je la connais" ; "Je suis allée chez lui plusieurs fois mais il était toujours absent."
Ainsi, pour le marché et l'achat des carottes dont il était question plus haut, j'aurais de préférence écrit "Je suis allée au marché..."
Je ne sais pas si quelqu'un saisit ce que j'essaie de dire... ;-)
La police m'a demandé si je suis allé au marché le matin du crime.
La police m'a demandé si j'ai été au marché le matin du crime.
En réponse à la police
- NON.
- OUI!
Comment cela?
Je suis allé au marché la veille et j'y suis resté.
Les deux verbes ne comportent pas du tout le même sens dans ce cas, et, a fortiori dans l'example donné.
Pour JSC : attention au temps du verbe. Vu l'emploi très courant (et correct, en dépit du sens premier du verbe) de "être" au sens d' "aller" au passé composé et avec un complément de lieu, le locuteur moyen comprendra presque automatiquement la seconde phrase comme une demande à propos d'un déplacement :
"La police m'a demandé si j'ai été au marché le matin du crime."
NON... Car c'est hier que je m'y suis rendu, que j'y suis allé, que j'y ai été.
Mais employé à l'imparfait, le verbe "être", toujours pour le locuteur moyen, retrouvera forcément sa valeur de "présence dans un lieu".
La police m'a demandé si j'étais au marché le matin du crime.
OUI... Car j'y étais bien ce matin-là, j'y suis resté.
Subtil !
Quant à la fraîcheur du message... Ce n'est pas moi qui l'ai sorti du congélateur, c'est Cyn, ce matin. Et c'est sa remarque qui m'a incité à répondre.
Mais en français, pour sortir de ce flou on a mis des formes qui segmentent le temps de manière à se repérer, comme le passé ou le futur antérieurs. Cela permet de dater les évènements les uns par rapport aux autres, mais pas de rendre compte de l'impression très répandue d'un passé qui dure encore.(la psycnalyse s'y jette à corps perdu)
C'est alors que la distinction du verbe être et du verbe avoir peut, mais pas forcément, signaler ce que la langue ne permet pas de dire autrement. Si on veut l'entendre ainsi, le verbe être convient pour indiquer que ce qui s'est passé dure encore, tandis que le verbe avoir signale que c'est maintenant effacé.
Dans ce cas, celui où on a l'oreille fine et cherche à tout prix une présomption, "je suis allé au marché le jour du crime" a valeur d'un aveu partiel (je suis bien engagé dans cette affaire comme témoin et j'aurais du voir), tandis que "j'ai (bien) été au marché le jour du crime" indiquerait plutôt un évènement fortuit qui ne m'engage en rien.
Il s'agit d'indices tellement ténus qu'on ne peut pas s'y fier. Pourtant, je pense qu'il y a une petite différence entre "je suis allé à Rome" (en tant que chrétien) et "j'ai été à Rome" (en tant que touriste).
Mais qui la sent ? C'est comme la différence entre "sans doute" et "peut-être", pourtant de grande portée.
- comme j'avais dit.
- Je ne comprends pas l'à propos de cette phrase. Mon , précédant ta citation, évidemment est divorcé de ce qui suit....
Il existe un poème de Paul Eluard où ce dernier use du verbe être là où, aujourd'hui, nous attendrions plutôt le verbe aller. Est-ce la langue qui a évolué ?
Je mènerai mon enfant
Partout où je n'ai pas été.
Avec lui sur du marbre blanc,
Dans les palais d'Orient
Je rirai aux gens de couleur (...)
Non, ce n'est pas du tout une tournure ancienne et qui n'aurait plus cours.
Elle est très courante et elle est consignée dans les dictionnaires.
Petit Robert, article ÊTRE, III, 3 : Relire notamment les messages n°6 et 7 de la présente discussion.